Le 23/02/2023 entrait en vigueur l'Arrêté du Gouvernement wallon (AGW) relatif aux critères de durabilité de la biomasse pour la production d'énergie, et aux critères de réduction des émissions de gaz à effet de serre . Ce texte transpose partiellement dans le droit wallon la Directive européenne 2018/2001 (RED II) et introduit des conditions spécifiques pour l'accès aux aides publiques destinées aux énergies produites à partir de la biomasse.
En effet, dans certains cas, ne seront considérées comme renouvelables et donc éligibles aux aides publiques, que les énergies qui respectent des critères liés :
1. à la durabilité de la biomasse : ces exigences concernent certains types de biomasse forestière et agricole et sont principalement liées à la provenance ou aux conditions d'exploitation lors de leur production.
2. à l'atteinte effective de seuils de réduction des émissions des gaz à effet de serre que doit entraîner l'utilisation de la biomasse pour la production d' énergie, comparativement à l'utilisation de combustibles fossiles.
Le 08/06/2023, un projet d'arrêté modificatif de ce texte a été approuvé en troisième lecture par le Gouvernement wallon.
Un arrêté ministériel précisant les modalités d'application concernant les preuves à apporter de la durabilité de la biomasse énergie a été publié le 23 janvier 2024.
1. Définitions importantes
· Preuve de durabilité : « une déclaration émise par un opérateur économique disposant d'un certificat délivré par un organisme de certification dans le cadre d'un système volontaire. La preuve de durabilité certifie la conformité d'un lot spécifique de biomasse ou de carburants aux critères de durabilité et/ou de réduction des émissions de gaz à effet de serre énoncés aux articles 5 à 11 de l'arrêté du Gouvernement wallon du 10 février 2022 relatif aux critères de durabilité de la biomasse pour la production d'énergie et des critères de réduction des émissions de gaz à effet de serre et modifiant l'arrêté du Gouvernement wallon du 30 novembre 2006 relatif à la promotion de l'électricité produite au moyen de sources d'énergie renouvelables ou de cogénération. »
· Opérateur économique : « un producteur de biomasse, un collecteur de déchets et de résidus, un exploitant d'installations transformant de la biomasse en produits intermédiaires ou finaux pour la production de combustible, un exploitant d'installations produisant de l'énergie à partir de la biomasse, ou tout autre opérateur, y compris des exploitants d'installations de stockage ou des négociants qui sont en possession physique de matières premières ou de carburants issus de la biomasse, pour autant qu'ils traitent des informations portant sur les caractéristiques de durabilité et de réduction des émissions de gaz à effet de serre de ces matières premières ou carburants. » Pour le cas du gaz renouvelable produit à partir de biomasse, sont également visés les producteurs, les intermédiaires et fournisseurs de gaz ainsi que les clients finals . »
· Lot : « l'ensemble de matières premières présentant les mêmes caractéristiques de durabilité et de réduction des émissions de gaz à effet de serre. »
· Puissance thermique nominale (Pn) : « la quantité maximale d'énergie thermique par unité de temps en entrée de l'équipement de production, exprimée sur la base du pouvoir calorifique inférieur fixé et garanti par le fabricant et pouvant être apportée par le combustible et consommée par l'équipement de combustion en marche continue. »
2. Mon installation est-elle concernée par cette législation ?
Afin de déterminer si votre installation est concernée par cette législation et si des démarches doivent être entreprises, il faut tout d'abord regarder la puissance thermique nominale (Pn) de l'installation.
Si votre installation dépasse le seuil de puissance correspondant à sa filière, vous devez entreprendre des démarches et vérifier quels critères s'appliquent en fonction du type de biomasse utilisé (voir point 4.)
Dans le cas contraire, la biomasse utilisée est par défaut considérée comme durable et aucune démarche ne doit être entreprise.
3. Quels sont les critères à respecter en matière de durabilité, de réduction des émissions de gaz à effet de serre, et de bilan de masse ?
· Pour connaître les critères de durabilité et les seuils de réduction des émissions des gaz à effet de serre requis, voir les articles 5 à 11 de l'AGW .
· Art 12 de l'AGW : pour le calcul de l'atteinte des seuils de réduction des émissions des gaz à effet de serre exigés par l'article 11 de l'AGW, la méthodologie de calcul et les valeurs de référence applicables sont décrites dans les annexes de l'arrêté ministériel précisant les modalités d'application concernant les preuves à apporter de la durabilité de la biomasse énergie.
· Les principes concernant l'utilisation d'un bilan massique sont repris aux articles 14 et 15 de l'AGW.
4. Pour quels types de biomasse les critères de durabilité et/ou de réduction des gaz à effet de serre sont-ils applicables ?
Dans le tableau ci-dessous, un ‘OUI' indique que le critère spécifié doit être respecté : des preuves de durabilité doivent être émises pour la biomasse.
Le critère de réduction des émissions de gaz à effet de serre s'applique uniquement aux installations dont la date de mise en service de la plus récente des unités est postérieure au 31 décembre 2020.
Cas | Exemple | Concerné par les critères de durabilité (Articles 4 à 10 de l'AGW) | Concerné par les critères de réduction des GES ? (Articles 11 à 12 de l'AGW) |
Biomasse pour produire biocarburants à RW ne s'en occupe pas (voir législation fédérale) | / | / | |
Déchets/résidus autres que de l'agriculture, aquaculture, pêche et sylviculture (article 4 AGW) | Biodéchets de restaurant et industrie alimentaire, boues d'assainissement et déchets de construction y sont inclus | NON | OUI |
Déchets/résidus d'abord transformés en un produit avant d'être transformés en bioliquides et combustibles (article 4 AGW) | Anciens meubles, résidus/déchets issus des activités de scierie | NON | OUI |
Déchets solides municipaux (article 4 AGW) | Les boues d'assainissement et déchet de démolition ne sont pas des déchets municipaux | NON | NON |
Biomasse agricole tombant sous le coup des articles 5 à 8 de l'AGW |
| OUI | OUI |
Biomasse forestière, incluant les résidus et les déchets issus des opérations de sylviculture, tombant sous le coup des articles 9 et 10 de l'AGW |
| OUI | OUI |
Un outil de calcul wallon permettant de réaliser une estimation des réductions d'émission de gaz à effet de serre en fonction des intrants utilisés et des performances de l'installation est disponible sur le site internet de l'Administration : Outil RED II - SPW (wallonie.be) .
Attention, cet outil n'est pas reconnu par la Commission européenne et le résultat d'une simulation ne peut pas être utilisée en tant que tel comme preuve du respect du critère de réduction des émissions de GES. En début de projet, une simulation permet néanmoins d'identifier les paramètres spécifiques à son installation pouvant impacter négativement le bilan CO2 de l'installation (utilisation trop importante de cultures énergétiques, distances de transport des intrants, émissions fugitives de CH 4 et de N 2 O, rendements de l'installation...).
Pour la biomasse forestière en provenance de Wallonie, un rapport endossé par le schéma volontaire "SPB" démontrant que cette biomasse peut être présumée durable est disponible ici.
5. Quelles démarches entreprendre ?
Elles varient en fonction des cas de figure suivants :
1. Si la puissance thermique nominale de votre installation est inférieure au seuil correspondant à ma filière (biomasse gazeuse, solide ou liquide)
Dans ce cas, aucune démarche ne doit être entreprise et cette législation ne s'applique pas à votre installation. La biomasse est considérée comme étant durable par défaut.
2. Si la puissance thermique nominale de votre installation est supérieure au seuil de la filière et si la biomasse utilisée rentre dans les catégories concernées par les critères de durabilité et/ou de réduction des émissions de gaz à effet de serre
Des preuves de durabilité doivent être émises et accompagner chaque lot de biomasse concerné par un des critères. Afin de pouvoir émettre des preuves de durabilité, une certification effectuée par un auditeur affilié à un « Schéma Volontaire » reconnu par la Commission européenne doit être obtenue. Les preuves de durabilités doivent être émises par les producteurs d'énergie et/ou les fournisseurs de la biomasse.
Pour connaître la liste à jour des Schémas Volontaires reconnus, voici le lien de la Commission : https://energy.ec.europa.eu/topics/renewable-energy/bioenergy/voluntary-schemes_en#approved-voluntary-schemes-and-national-certification-schemes . Attention, cette liste est évolutive : de nouveaux schémas volontaires pourrait s'y ajouter prochainement.
Il convient de consulter cette liste pour en choisir un qui correspond à la situation de votre installation, ceci du fait que certains schémas volontaires sont spécialisés (zone géographique, type de biomasse, de production énergétique).
Une fois le schéma volontaire sélectionné, vous devrez prendre contact avec un auditeur indépendant accrédité par ce schéma. La liste des auditeurs accrédités est la plupart du temps reprise sur le site internet du Schéma Volontaire. Il est possible que certaines de ces entreprises d'audit soient basées à l'étranger mais actives en Belgique.
A titre exemplatif, vous trouverez ci-dessous un tableau reprenant des Schémas Volontaires reconnus par la Commission qui semblent correspondre aux opérateurs wallons, ainsi qu'un lien vers la page de leur site web reprenant les auditeurs indépendants accrédités par chaque schéma.
Pour assurer le respect des délais requis pour la certification qui vous permettra d'éviter une interruption des aides publiques auxquelles vous pourriez éventuellement avoir droit au titre de producteur d'énergie renouvelable, nous vous recommandons fortement de prendre contact dès que possible avec des auditeurs affiliés au schéma volontaire que vous aurez sélectionné, ceci : - Pour savoir quelles informations vous devez collecter sur la biomasse utilisée, qui serait indispensable pour obtenir la certification. - Pour pouvoir obtenir la certification dans les délais. En effet, le processus de certification peut durer plusieurs mois et il y a des listes d'attente pour certains schémas volontaires.
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3. Si la puissance thermique nominale de mon installation est supérieure au seuil de ma filière et si la biomasse que j'utilise n'est concernée par aucun des critères de durabilité et de réduction des émissions de gaz à effet de serre
Pour les installations dépassant le seuil de puissance de sa filière mais dont la biomasse ne doit répondre ni aux critères de durabilité, ni au critère de réduction des gaz à effet de serre, l'Administration demande tout de même une preuve que les intrants utilisés font partie des catégories exemptées des critères de la RED II au titre de l'article 4 de l'AGW.
Celle-ci peut être amenée de deux manières :
· Soit en remettant des preuves de durabilité, dans le cadre d'une certification via un système volontaire. Il faut dans ce cas se faire certifier de la même manière que les installations concernées par au moins un critère.
· Soit en remettant une déclaration sur l'honneur reprenant les quantités et la nature des matières utilisées ainsi que des preuves démontrant en quoi cette biomasse appartient à une ou plusieurs catégories exemptées(s) et n'est donc pas soumise aux différents critères. Cette déclaration sur l'honneur et les preuves associées doivent faire l'objet d'un contrôle annuel indépendant répondant à la norme ISAE 3000
6. Preuves de durabilité - Mode de vérification des critères de durabilité et de réduction des émissions de gaz à effet de serre
Pour que de l'énergie produite à partir de biomasse soit qualifiée de « renouvelable » et le cas échéant donner accès à des aides publiques, il est exigé d'apporter la preuve que la biomasse utilisée pour la produire respecte des critères de durabilité et de réduction des émissions de gaz à effet de serre.
Pour ce faire, chaque lot de biomasse entrant dans la production d'énergie renouvelable doit être accompagné d'une « preuve de durabilité ». Le découpage en lot peut être réalisé par l'opérateur économique selon une quantité de matière ou selon une période de temps tant que les matières qui composent un lot présentent les mêmes caractéristiques de durabilité.
Seul un opérateur économique auparavant certifié par le biais d'auditeurs affiliés à un des “Schémas Volontaires” reconnus par la Commission Européenne peut émettre une preuve de durabilité.
La certification ne porte pas directement sur la biomasse : elle certifie qu'un opérateur a mis en place un système fiable, transparent et complet de gestion d'information sur la durabilité de la biomasse qui passe entre ses mains. Cet opérateur peut alors délivrer des "preuves de durabilité" pour les lots de biomasse.
Les preuves de durabilité garantissent une traçabilité de la biomasse au regard des critères de durabilité et des gaz à effet de serre produits.
Notons que, si seule une part de la biomasse utilisée pour la production d'énergie est durable, l'énergie ne sera considérée comme durable qu'au prorata (%) de la biomasse durable entrant dans sa production.
7. Comment transmettre les preuves de durabilité à l'Administration ?
Les preuves de durabilité sont transmises trimestriellement à l'Administration, en même temps que la déclaration d'octroi pour l'obtention de certificats verts.
Les preuves de durabilité doivent être émises dès le début de la production d'énergie, à partir de l'octroi du certificat de garantie d'origine.
L'ensemble des preuves de durabilité émises sur l'année écoulée doivent être transmises à l'organisme agrée lors du contrôle annuel de l'installation.
Le cas de la filière biométhane est particulier. Puisque la règlementation s'applique aux combustibles issus de la biomasse, aussi bien les producteurs de biométhane que les clients finals sont concernés et doivent démontrer le respect des critères. Les injecteurs de biométhane ne bénéficiant pas directement d'une aide à la production, les preuves de durabilités émises pour le biométhane injecté seront contrôlées lorsqu'une cogénération au gaz naturel réclame des certificats verts additionnels pour l'utilisation de ce biométhane. Dans ce cas, les preuves de durabilité doivent être accompagnées des garanties d'origine correspondantes au biométhane injecté.
8. Quelles sont les sanctions encourues si la biomasse utilisée ne respecte pas les critères de durabilité et de réduction des émissions de gaz à effet de serre ?
En cas de non-respect des critères de durabilité et de réduction des émissions de gaz à effet de serre, aucune forme de soutien ou d'aide financière ne sera accordée pour l'énergie produite à partir de la biomasse qui ne respecte pas ces critères.
9. Disposition transitoire
l'Arrêté du Gouvernement wallon du 22 février 2022 relatif aux critères de durabilité de la biomasse pour la production d'énergie et des critères de réduction des émissions de gaz à effet de serre est entré en vigueur le 23 février 2023. Les dispositions reprises dans le texte d'appliquent dès lors à partir de cette date.
Toutefois, l'arrêté du 8 juin 2023 modifiant l'Arrêté du Gouvernement wallon du 22 février 2022 a prévu la disposition transitoire suivante :
“ Les lots de biomasse utilisées pour la production d'énergie entre le 23 février et le 31 décembre 2023 pour lesquels il n'aura pas été possible d'obtenir une preuve de durabilité au sens de l'article 16 sont présumés en conformité avec les critères de durabilité et de réduction des émissions de gaz à effet de serre, si pour chaque lot de biomasse pour lequel il n'a pu obtenir une preuve de durabilité, le producteur d'énergie communique à l'administration tous les éléments de preuve :
- démontrant qu'il a tout mis en œuvre pour obtenir ou émettre au plus vite des preuves de durabilité conformes à l'article 16, et les raisons pour lesquelles il n'a pas été raisonnablement possible de les obtenir ;
- démontrant les raisons pour lesquelles il n'a pu développer d'alternatives raisonnables pour accéder à d'autres sources de biomasse pour lesquelles une preuve de durabilité aurait pu être obtenue ;
- démontrant dans quelle mesure la biomasse concernée offre des caractéristiques qui lui permet de répondre aux critères repris dans les articles 5 à 11 du présent arrêté, en fournissant également le bilan massique.
Les preuves fournies font l'objet d'un audit de vérification réalisé par un auditeur indépendant, ceci conformément aux exigences de la norme ISAE 3000. Le rapport d'audit sera remis à l'administration au plus tard le 31 mars 2024.”